La légalisation de la marijuana n’a jamais été entreprise pour autre chose que les votes et l’argent

Oh Cannabis, we stand on guard for thee.

Comme vous le savez maintenant, le gouvernement Trudeau prévoit rendre légal l’usage de la marijuana récréative d’ici le 1er juillet 2018 et qu’il s’efforce de rédiger un projet de loi d’ici le 20 avril – à temps pour le « 4/20 », l’événement annuel qui attire des amateurs de pot de partout et qui vise à consommer en public leur drogue favorite.

Sur les ondes du 640 AM, à Toronto, l’autoproclamé « Prince of Pot », Marc Emery, a louangé les vertus de ces deux dates. « C’est excitant de voir que tout ça prend forme, que ça va sortir juste avant notre fête nationale, le 20 avril, le mois prochain … et, qu’au Jour du cannabis 2018, ce sera légal … nous célébrons avec beaucoup de ferveur ces deux fêtes au Canada, et de cannabis, et donc ce sont des dates appropriées pour introduire la législation et rendre tout cela légal. »

Personnellement, je ne me réjouis pas à la pensée de voir mon enfant de sept ans debout dans un nuage de fumée secondaire de marijuana lors de notre célébration locale de la Fête du Canada, me demandant pourquoi la feuille d’érable sur le drapeau a été remplacée par une feuille de pot. Si la légalisation de la marijuana a vraiment pour but de garder cette drogue hors de la portée des enfants, alors pourquoi envisager la rendre légale à temps pour la Fête du Canada, lorsque des milliers d’enfants se rassemblent avec leurs familles sur la colline parlementaire et dans d’autres lieux publics?

Bien sûr, les défenseurs de la marijuana peuvent me reprocher de réagir de façon excessive. (Le gouvernement a dû choisir une date, alors pourquoi pas ce jour-là?) Mais c’est justement cela : pourquoi la légalisation doit-elle être planifiée autour de cette journée en particulier? Pourquoi mêler notre fête nationale dans ce spectacle, au lieu de simplement passer le projet de loi et retourner vaquer à nos occupations? Trudeau envisage-t-il fumer un joint à la télévision nationale, pour mieux pouvoir aller chercher le vote des amateurs de marijuana?

Nous parlons bien évidemment d’un calendrier législatif du gouvernement, ce qui tend à avoir des retombées. L’adoption d’une loi fédérale n’est que la première étape; les provinces devront ensuite s’occuper des menus détails des points de vente, des répercussions sur la santé et des questions d’application de la loi, y compris une possible augmentation des cas d’automobilistes conduisant sous influence.

Les municipalités devront adopter des règlements pour faire face à la consommation et à la vente sous diverses formes de la marijuana. Est-ce que les restaurants servant de la marijuana auront besoin d’un permis spécial, comme ils en ont besoin d’un pour servir de l’alcool? Quand est-ce qu’un biscuit n’est plus simplement… un biscuit? Les amateurs de cannabis ne devraient peut-être pas être aussi prompts à célébrer.

Trudeau a dit qu’il « ne légalise pas la marijuana pour plaire aux utilisateurs récréatifs », mais pour garder le pot loin des enfants et briser l’emprise du crime organisé sur le secteur.

« À l’heure actuelle, nous savons que les jeunes ont un accès plus facile à la marijuana qu’à n’importe quelle autre substance illicite. Il est plus facile pour un adolescent d’acheter un joint que d’acheter une bouteille de bière. Ce n’est pas juste », a déclaré Trudeau aux journalistes, le 2 mars dernier en Colombie-Britannique. « Deuxièmement, nous savons que les organisations criminelles et les gangs de rue font des milliards de dollars avec la vente de la marijuana. Nous pensons que la réglementer et la contrôler, retirera ces revenus des poches des criminels et les mettra dans un système où nous pourrons à la fois surveiller, taxer et assurer que nous soutenons les personnes qui sont confrontées à des défis liés ou non à la consommation de drogues. »

Le PM s’en fait trop accroire. Oui, les adolescents canadiens fument déjà plus de pot que tous les autres jeunes de la planète, mais ils achèteront encore de la marijuana sur le marché noir une fois que ce sera légal, tout comme ils achètent des cigarettes de contrebande aujourd’hui. Et les gangs de rue seront toujours impliqués dans cette entreprise, fixant les prix de leurs produits en deçà de ceux de la marijuana réglementée et taxée. C’est économique.

Le véritable but de la légalisation de la marijuana est double : courtiser le vote des milléniaux et récolter le genre d’impôts qui fait saliver tout gouvernement lourdement endetté. Selon les estimations de la CIBC, la légalisation du pot pourrait rapporter 5 milliards de dollars par année aux gouvernements fédéral et provinciaux. Selon Deloitte, la valeur totale d’une légalisation du cannabis pour l’économie canadienne – la croissance, la distribution, les produits dérivés, le tourisme et les taxes – pourrait atteindre 22,6 milliards de dollars par année. Ce sont des chiffres bienvenus dans un pays où les déficits augmentent, où les jeunes ne peuvent pas se trouver d’emploi et où la renégociation de l’ALENA se dessine à l’horizon, tel un gros nuage noir.

Alors, pourquoi le fait de s’attaquer à ces priorités devrait-il s’opposer à la promesse « des plus importantes » de légaliser le pot? Peut-être s’agit-il d’un deux-pour-un? Les gouvernements sortent du rouge, les jeunes décrochent des emplois dans les coopératives légales de culture du cannabis et les touristes américains pressent Trump de garder les frontières ouvertes, afin qu’ils puissent venir faire la fête chez nous.

Bon Jour du cannabis!

La version anglaise de ce texte se trouve sur le site de iPolitics.

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