Il est probablement trop tard pour sévir contre les passages illégaux à la frontière

Ottawa n’agira pas maintenant de peur d’offenser l’administration Trump

Ce n’est pas (encore) un déluge, mais le flot des réfugiés qui viennent au Canada continue de grossir. Depuis le 1er janvier, la GRC a intercepté 1 860 migrants qui ont traversé illégalement au Canada en provenance des États-Unis : 315 en janvier, 658 en février et 887 en mars.

La plupart d’entre eux ont traversé au Québec, près de Lacolle, et au Manitoba, près d’Emerson. Vendredi dernier, la candidate au leadership du Parti conservateur Kellie Leitch a visité Emerson et s’est engagée à adopter une ligne beaucoup plus dure face au problème, si elle est élue à la tête du parti.

« Les personnes qui entrent illégalement dans notre pays devraient être détenues, interrogées puis renvoyées aux États-Unis », a déclaré Mme Leitch à la CBC. « L’immigration illégale est injuste envers ceux qui postulent conformément aux règles ».

Sans blague! Mais à moins que Leitch ait l’intention de changer la loi, elle fait là une promesse bien creuse – un peu plus de viande pour la clientèle qu’elle courtise avec son « test de valeurs canadiennes » pour les immigrants.

Les migrants qui traversent au Canada enfreignent peut-être la loi, mais une fois ici, ils ne peuvent être renvoyés. Ils ont le droit de demander l’asile grâce à une échappatoire dans l’Entente sur les tiers pays sûrs avec les États-Unis.

Et bien qu’il y ait de bonnes raisons de fermer cette échappatoire, il est difficile de voir pourquoi un premier ministre canadien serait pressé de le faire dans le climat politique transfrontalier actuel. Avec les négociations de l’ALENA qui pointent à l’horizon, un président Trump qui répète que le Canada s’en prend injustement aux producteurs laitiers américains sans défense, et le « Buy American » de retour en force à Washington, prendre maintenant des mesures plus sévères à la frontière pourrait mettre en danger nos relations commerciales.

Considérez ceci : il semblerait que les agents frontaliers des États-Unis facilitent effectivement ces passages illégaux vers le Canada. Selon Jean-Pierre Fortin, président national du Syndicat des douanes et de l’immigration, « (les douaniers canadiens) sont convaincus que les Américains se débarrassent du problème en amenant les demandeurs d’asile à Roxham Road au lieu de les conduire au passage frontalier de Lacolle ».

Trudeau sait que la fermeture de l’échappatoire dans l’Entente avec les États-Unis sur les tiers pays sûrs permettrait au Canada de faire face au problème en éliminant une incitation à traverser la frontière illégalement. Cependant, cela risquerait de déplaire à Trump et à ses électeurs – qui sont probablement très heureux de voir les réfugiés sortir de leur pays, plutôt que d’y entrer. Donc, au lieu de bousculer l’éléphant, la souris est assise tranquillement sur le bord du lit…

L’ironie, bien sûr, c’est que cet exode de demandeurs d’asile n’est pas uniquement dû à Trump; Trudeau en est également responsable. Au lendemain du 27 janvier, jour où Trump a signé son ordre exécutif visant à stopper les visas dans sept pays majoritairement musulmans, Trudeau a tweeter une photo de lui-même accueillant un jeune réfugié syrien. « Notre petite ville a été directement touchée par ces commentaires », a déclaré Greg Janzen, maire d’Emerson. « C’est littéralement à ce moment que les chiffres ont vraiment commencé à augmenter … c’est sans précédent. »

Mais le nombre de demandeurs d’asile utilisant les États-Unis comme une voie plutôt que destination a effectivement commencé à augmenter après l’entrée en fonction de Trudeau, en partie parce que le gouvernement libéral a été perçu comme plus accueillant envers les nouveaux arrivants, suite à son engagement d’accueillir 25 000 réfugiés syriens.

Trudeau a également fait une priorité de la levée des exigences de visa pour le Mexique, exigences imposées par le gouvernement précédent en 2009 en réponse à des préoccupations selon lesquelles des Mexicains enfreignaient le processus d’immigration officiel et faisaient de fausses demandes d’asile au Canada. Au cours de la campagne électorale de 2015, Trudeau a annoncé qu’il allait lever l’obligation de visa. « Comme avec les États-Unis », a déclaré Trudeau alors, « l’approche (du premier ministre Stephen) Harper à l’égard des relations avec le Mexique a été belliqueuse et presque grossière ».

Grossière ou pas, Harper avait clairement pressenti quelque chose. Depuis que Trudeau a levé les exigences en matière de visas, le 1er décembre 2016, le nombre de demandeurs d’asile en provenance du Mexique n’a pas cessé d’augmenter. Les chiffres de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié montrent que 110 personnes en provenance du Mexique ont demandé le statut de réfugié en mars, contre 85 en février et 71 en janvier, pour un total de 266 au cours des trois premiers mois de 2017 – beaucoup plus que les 241 personnes qui ont réclamé le statut de réfugiés durant toute l’année 2016. Nous sommes loin des niveaux de 2008, lorsque les ressortissants mexicains ont déposé 9 000 demandes de statut de réfugié – près de 25% de toutes les réclamations de cette année-là –, mais si la tendance se maintient, l’augmentation engendrera des coûts nets de 262 millions de dollars en 10 ans au Canada.

Je parie que l’administration Trump n’est pas trop contrariée à propos de cette politique, car cela signifie que peu de Mexicains cherchent à venir aux États-Unis – pas de mur nécessaire. Alors, malgré le fait que le gouvernement canadien aurait déclaré au gouvernement mexicain qu’il rétablirait le visa si les demandes d’asile atteignaient un certain niveau, Trudeau n’est pas susceptible d’agir sur ce front non plus.

Trudeau n’aurait pas pu prévoir l’élection de Trump quand il a fait ses promesses de campagne, mais le problème auquel nous sommes confrontés aujourd’hui est de sa faute – et il est maintenant impuissant. Pire encore, il a ouvert la porte à des politiciens comme Leitch qui capitalisent sur la situation en mettant de l’avant des politiques qui sont exactement à l’opposée de l’ouverture qu’avait l’intention de promouvoir Trudeau.

Les Canadiens peuvent seulement espérer que les négociations de l’ALENA seront entreprises rapidement et que, une fois terminées, le gouvernement fédéral agira pour fermer l’échappatoire dans l’Entente sur les tiers pays sûrs, revoir l’exigence des visas au Mexique et tout faire ce qui est nécessaire pour que notre système de réfugiés demeure juste et qu’il décourage le resquillage – sans engendrer l’intolérance.

La version anglaise de ce texte se trouve sur le site de iPolitics.

One Comment

  1. Who care what Donald Trump thinks. Look what he is doing to our economy first dairy now lumber. This has nothing to do with these people crossing into Canada from the USA. These people need to be giving a choice 1 go back to the USA or get deported back to their own country. That is what happens when you break the law. Plain and simple. Why are we allowing this to happen. We are already in a financial crisis in Canada. Now we have to take on these people . Support them when our own people need help. What is wrong with this do gooded society we are living in. Charity starts at home. Not with other country’s. At home.
    I am sad and feel sorry for them but we did not create this problem . But we are creating problems here in our own country. Look around. Look at the crime that has gotten worse. Our own kids are getting killed. Poverty is getting worse. When that happens so does crime. It does not take a rocket scientist to figure this out. Thank you for hearing me out. I am so concerned about us as a country.

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